Comme beaucoup, je suis éprouvé par ce qu'il vient de se passer, que penser ? Que faire ? Comment agir ?
J'ai pris le temps de me poser la question afin de ne pas tomber dans un vain théâtralisme de ma souffrance au regard de ceux qui ont tant perdu. Aussi, j'ai eu l'intuition que c'était à travers mon métier que je pouvais être le plus utile. J'ai donc choisi de partager des éléments sur l'accompagnement d'un évènement brutal et douloureux.
Qu'est ce qui arrive en nous? Un évènement brutal et douloureux est une effraction violente de notre bulle de tranquillité. Il réveille en sursaut notre cerveau émotionnel qui prend les commandes pour nous informer que notre besoin de sécurité est malmené. Ces émotions secouent notre cerveau qui produisent des pensées pour tenter de comprendre et de résoudre l'inimaginable. La machine à solution est en route pour conceptualiser ce qui est pour l'instant innommable et trouver du sens. Cette démarche dans l'urgence est vaine. Elle génère des pensées hameçons qui nous amènent à la rumination. Elles ne font qu'augmenter la souffrance. La personne touchée quitte le présent pour faire des aller- retours incessants entre le passé et le futur. Elle tente de refaire le film de l'histoire tout en se projetant dans des scénarios futurs proches de la science fiction. Ces pensées hameçons commencent par des "et si..", "je me dis…". Tout cela se traduit par des ruminations, des insomnies et des flashbacks pendant plusieurs jours. Notre cerveau est affolé pour tenter de remettre en ordre l'harmonie intérieure. C'est "normal", sachez le.
Comment faire face à ce tsunami intérieur? Tout d'abord ralentir pour faire de la place aux émotions et essayer de les accueillir aussi grosses quelles soi. Pour cela, on peut pratiquer une respiration ventrale qui nous ancre dans l'instant : respiration après respiration. Le piège est de mordre aux pensées hameçons qui nous amènent à la rumination et à la fabrication d'émotions négatives. Les émotions ont besoin de place dans le ventre pour ne pas monter vers le cerveau et le secouer violemment. Choisir de ne pas commenter les manifestations physiques et psychiques liées à cette épreuve. Accueillir les insomnies et les flashback comme des éléments inéluctables de la digestion de l'événement. Ne pas s'isoler. Les émotions sont sources d'énergie. Une façon de les évacuer est de parler à quelqu'un qui sait écouter et accueillir ce que nous ressentons. Lorsqu'il nous arrive un évènement intense heureux ou malheureux nous avons besoins d'en parler jusqu'à "plus soif". Le lien social permet de rééquilibrer la balance émotionnelle en générant des émotions plus positives. C'est pour cette raison que de nombreuses personnes qui vivent un évènement dramatique ont envie de se retrouver. Il ne faut pas hésiter à contacter sa famille, des amis, un médecin ou un psychologue pour garder contact avec de l'humanité. Un professionnel aidera à mettre des mots, à reconnaitre ce qui se passe en nous, à partager et à purger cette folle tension qui se met en place et qui peut nous déborder de toute part comme des somatisations ou de l'angoisse. En outre ces émotions peuvent réveiller d'anciens trauma. Les objectifs de l'espace d'écoute et d'expression lors du débriefing :
- Ecouter pour agir,
- Ecouter c’est déjà agir,
- Aider les individus à s’adapter à ce qui se présente à eux et à trouver de nouveaux repères.
- Dépister les vulnérabilités individuelles
- Verbaliser le plus rapidement les émotions afin qu’elles ne prennent pas racines pour structurer une souffrance.
- D’identifier les facteurs générateurs de stress,
- D’anticiper les événements futurs en donnant une information sur les mécanismes de deuil.
- Prévenir les pathologies liées au stress. Orienter si besoin vers le réseau de soin pour un suivi.
- Faire un recueil épidémiologique afin d'adapter l'offre de soin.
Informations sur les étapes du deuil :
- Le déni : Au début, on n'arrive pas y croire,
- La colère : Cela met en colère
- Le rationalisme morbide : On imagine plein de choses
- La déprime : C’est triste, on se sent triste, c’est un sacré coup…
- L’acception : Il va bien falloir trouver une solution pour soi.
Un esprit qui éprouve des difficultés à négocier un tel événement peut être confronté aux trois F : Freeze, Fight, Fly. C'est-à-dire sidération, agitation combative ou fuite. Il est important de repérer ces tentations comportementales afin qu'elle ne nous confronte pas à un autre danger. Si l'anxiété et les insomnies sont trop douloureuses, il ne faut pas hésiter à prendre de temps en temps un somnifère ou un anxiolytique. Par contre, il est nécessaire de laisser de coté l'alcool et les stupéfiants qui ne feront qu'augmenter les troubles malgré l'illusion des bénéfices immédiats. Attention aussi aux réactions paradoxales d'excitations ou d'agitations. Porter un regard de compassion et d'amour sur soi afin d'accueillir sa fragilité qui nous fait ressentir que nous sommes éprouvés. Nous ne sommes que des humains. Prendre soin de son corps en faisant de la méditation, de la relaxation, de la marche, du sport, etc. L'activité physique a des vertus anxiolytiques et antidépressives. Soigner son sommet et avoir une saine alimentation. Eviter les toxiques et les excitants. En outre, toute action positive sur notre corps rééquilibre aussi notre balance émotionnelle. Se connecter aux médias de façon parcimonieuse et adaptée. La consommation de nouvelles bouleversantes participe à l'agitation cérébrale et favorise le vécu traumatique de l'évènement.
En conclusion Un évènement brutal et douloureux est comme un gros caillou que l'on projette violemment dans notre lac intérieur de sérénité. Retrouver de la paix demande le temps que les vagues puis le clapot issus de cet évènement disparaissent. Cela nécessite de la mansuétude et de la compassion à son égard afin de faire de la place à l'épreuve. Il nous informe que nous ne sommes que des êtres humains. Bon courage à tous ceux qui sont touchés de prêt ou de loin par les évènements.
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