« Mon enfant est timide, il ne dit jamais bonjour ...» Nombre d'enfants se montrent timides hors de la maison. Explications et conseils
La timidité extra-familiale chez l’enfant de moins de 8ans est extrêmement fréquente. Dans l’immense majorité des cas, elle n’est pas préoccupante et cédera progressivement spontanément. Je vous propose dans cet article d’en comprendre les mécanismes psychiques, d’apprendre à repérer les signes d’une timidité pathologique, afin d’accompagner au mieux votre enfant et de bien calibrer vos réactions.
Les jeunes enfants ont tous des angoisses de séparation (angoisse d’être écarté de la mère, ou de la personne rassurante et aimée), par conséquent dès la première année de vie ils repèrent les étrangers de façon négative, c’est à dire comme des potentiels « tiers séparateurs », des gens pouvant se mettre entre eux et leur mère. Ces angoisses de séparation peuvent être fortes et secondaires à des vécus douloureux passés de perte chez un enfant (dépression d’un des parents, perte d’un proche, tensions familiales, divorce,...). Dans ces cas, la « timidité » de l’enfant est extrême, c’est à dire qu’il reste toute la journée accroché à son parent, et accompagnée d’autres symptômes, comme des angoisses nocturnes, des phobies du coucher, une absence de plaisir social, un mutisme complet hors de la maison, voire un retard des apprentissages (par refus anxieux et non par incompétence intellectuelle.). En pratique, dans ces cas difficiles, il convient de rassurer l’enfant et de mettre au point des séparations très progressives mais très régulières (grands parents, nounous...), et bien sûr de consulter un pédopsychiatre afin qu’il évalue le trouble et guide précisément et efficacement la famille.
Cependant dans la majorité des cas, les angoisses de séparations sont en réalités modérées, et l’enfant confond alors angoisse et « déplaisir » ou frustration. C’est à dire que l’enfant n’est pas terrifié à l’idée de se séparer des parents, mais il n’arrive pas à lutter contre son plaisir excessif à être collé à son parent et donc refuse de le décoller en arguant une peur quelconque. C’est souvent le cas des ainés de la fratrie, très investis et très collés par les parents, qui refusent trop d’interagir avec le monde extérieur, car ce dernier sera toujours moins chaleureux et plus frustrant qu’une mère. Or il est important de pousser nos enfants à investir la vie sociale, les amis, les apprentissages... La timidité de ces enfants est souvent très sélective, transitoire, et isolée. Par exemple, ils vont pleurer ce qu’ils peuvent au moment de la séparation, mais s’amuser au bout de quelques minutes une fois le parent parti.
Par ailleurs, dans leur zone de confort il s’agit d’enfants qui se développe bien et peuvent se montrer curieux et joyeux. Le parent collé doit faire un vrai travail sur lui-même pour calmer sa culpabilité maternelle, afin d’aider son enfant à se décoller.
En effet, il s’agit souvent d’un excès relationnel à deux, et d’un véritable cercle vicieux. Il faut introduire du tiers et verbaliser sainement les choses avec son enfant. Le parent collé (le plus souvent la mère) doit laisser régulièrement la place au conjoint, ou à des proches pour que l’enfant développe des relations extra maternelles plaisantes. « Ah en fait ça peut être génial de faire des trucs différents sans maman ! ». Elle doit aussi avoir l’honnêteté et le courage de verbaliser à son enfant la nécessité d’une séparation régulière. « On a tous besoin de se séparer de temps en temps. Pour bien grandir il faut des moments où on est avec maman, avec papa, avec des adultes sympas et aussi des moments où on s’occupe seul dans sa chambre. Comme il faut manger de tout pour bien grandir, il faut tout les moments différents aussi ! ». Pire mesdames, il faut lui dire que vous aussi parfois vous aimez être seul, sans lui, prendre du temps pour vous ! « Si maman qui est si bonne pour moi assume le plaisir d’être seule, alors au fond ça doit être une chose positive pour moi aussi », voilà ce qu'il en conclura ! Beaucoup de parents entrent dans des conflits majeurs et pluriquotidiens avec leurs enfants parce qu’ils confondent impolitesse et timidité. Un enfant impoli ou transgressif avec un adulte doit être recadré, mais il ne sert à rien d’insister non stop avec son enfant timide pour qu’il dise bonjour aux adultes. Et cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, il va de plus en plus craindre de rencontrer des tiers car cela va rimer dans sa tête avec altercation avec son parent.
Ensuite, il est bien plus efficace de valoriser ses réussites, ses victoires sur ses peurs, plutôt que le gronder pour ses failles et ses incompétences. Un enfant sur de lui est toujours plus à l’aise en société.
Enfin, il se met en jeu un bras de fer toxique entre le parent et l’enfant, dont l’enfant inconsciemment peut jouer, soit par agressivité vis à vis du parent, soit par fierté de se sentir tout puissant, soit encore pour être le centre d’attention permanent du parent. « Si tu passes ton temps à te fâcher contre moi quand on est en société, alors tu te détournes de la société toi aussi et tu es à moi. En colère certes mais tu es à moi tout seul ! ».
Patience et dédramatisation sont encore une fois de mise...